MONTAILLOU, VILLAGE OCCITAN 1294 - 1324 Emmanuel Le Roy Ladurie

Grâce à l'étude de documents produits par le Tribunal de l'Inquisition qui fonctionne à Foix pour éliminer l'hérésie, l'auteur nous fait découvrir Montaillou, village de montagnards et de bergers dont les habitants ont été cités devant ce tribunal.

L'homme qui a ainsi fait parler les villageois s'appelle Jacques Fournier, évêque de Pamiers de 1317 à 1326, futur pape sous le nom de Benoit XII.  Prélat lucide, qui fait preuve d'un zèle inquisitorial puissant, il les interroge, assisté de deux dominicains, avec minutie et sans compter son temps pour traquer en eux l'hérésie cathare, ou simplement une quelconque déviation par rapport au catholicisme officiel.

Le résultat de ces interrogatoires parvenus jusqu'à nous sous la forme d'un gros manuscrit en latin, est un témoignage irremplaçable sur la terre occitane, au-delà du strict domaine des persécutions pour l'hérésie.
Vingt cinq accusés sont de Montaillou, c'est assez pour fournir une documentation sans pareille.
En s'appuyant sur le travail de Jacques Fournier, L'auteur de ce présent ouvrage, ressuscite toute une société villageoise aussi biene du point de vue de la vie quotidienne au sens matériel du terme que de sa vie spirituelle, sa culture et les rites de son existence.
Cette fresque rare dans son ensemble est devenue un grand classique sur cette période médiévale.

 A la tête de l' Office" se tient bien sûr Jacques Fournier lui-même. Inaccessible aux supplications comme aux pourboires. Habile à faire apparaître la vérité. A faire "jaillir les agnelles", comme disent ses victimes. Capable de distinguer en quelques minutes un hérétique d'un catholique "correct".

Vrai démon inquisitorial, affirment les prévenus dont il sonde les cœurs.  Sorte de Maigret obsessif et compulsif, il procède, et il réussit essentiellement grâce à l'habileté tenace et démoniaque qu’il déploie dans ses interrogatoires ; il n'a recours qu'assez rarement aux tortures.

Maniaque du détail, il assiste en personne à toutes les séances de son propre tribunal, ou peu s'en faut.  Il veut tout faire, ou du moins tout diriger par lui-même. Il refuse de déléguer les responsabilités à ses sous ordres, à ses scribes ou a ses notaires, comme le font, à de nombreuses reprises, les autres inquisiteurs, trop négligents.

Tout le registre d'Inquisition de Pamiers portera donc la marque ou la griffe de son intervention permanente.
Document d'une qualité extraordinaire de ce sujet peu connu.